Dimanche11 mai 1986, 11 h 30, plage du Platin,
Après l’averse qui avait failli noyer ce week-end sous l’ennui, le soleil se planquait encore timidement derrière quelques cumulonimbus récalcitrants et chauffait le sable détrempé d’où s’élevaient triomphalement des nuages de buée.
« Dans moins d’une heure, pensa le Docteur Boileau, il fera bon se dévêtir et flâner les pieds dans l’eau ».
C’est exactement ce qu’en pensait Baraka, qui, lasse de musarder le nez au ras de l’écume, décida derechef de se jeter toutes pattes en avant dans la première vague venue.
« Wap ! Wap ! Lance moi ce bâton ! Wap ! Wap ! Alors, qu’est-ce que tu attends ?»
Jappait-elle à l’adresse de son maître qui, pour la faire marronner, faisait semblant, balançait le bras, lui faisait faire des bonds et, pour finir, jetait le plus loin possible le bâton tant attendu. La chienne courait alors dans les vagues, ramenait le bâton à son maître, et le manège recommençait. Cela faisait bien dix minutes que ça durait. Le Docteur commençait à fatiguer.
« Bon, c’est la dernière fois » dit-il en lançant ce bon sang de bois de bâton !
Baraka bondit à sa recherche en gambadant, le nez dans le sable, sautant dans les vagues.
C’est à ce moment-là que quelque chose de bizarre, qui ne pouvait pas être son bâton, lui fit faire un bond et pousser un wap de surprise : pas facile, dans l’eau de mer, de flairer… De ses quatre pattes, elle plaqua la chose et accrocha, de ses dents, ce qui semblait être un morceau de tissu, n’écoutant que son instinct qui lui dictait d’attraper cet objet incongru et de le ramener à son maître. D’autant plus qu’à vue de truffe, cela ressemblait à un gros pantin désarticulé et tout compte fait, cela sentait bien un peu l’humain ! Elle se mit à tirer de toutes ses forces, réussit à sortir la chose de l’eau, dont elle faisait maintenant le tour en reniflant et en poussant de petits jappements.
Intrigué par ce manège, le Docteur rejoignit sa chienne et eut un haut le cœur en apercevant ce corps désarticulé, boursouflé et abîmé à un point que je ne puis vous décrire sans un soulèvement d’estomac !
« Beau dimanche en perspective » ! pensa-t-il. Il se baissa et, examinant tant bien que mal la dépouille, il en conclut qu’elle devait séjourner dans l’eau depuis longtemps. Homme ou femme ? Difficile à dire. Pourtant, la taille moyenne, les membres plutôt grêles, le peu de ce qui restait des vêtements faisaient penser qu’il s’agissait d’une personne de sexe féminin…
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